Synopsis
Mugabe et l’Afrcain blanc suit le sort d’une famille du Zimbabwe dans une situation des plus périlleuses. Car le président Robert Mugabe ne tolère plus les fermiers blancs, qui doivent rendre leurs terres, et risquent donc d’être expulsés sans ménagement. Le documentaire suit le combat de Mike Campbell, installé au Zimbabwe depuis plus de trente ans avec sa femme, son gendre et sa fille. Ils se retrouvent confrontés aux intimidations de la milice de Mugabe, de plus en plus menaçante. L’effet escompté est obtenu : c’est la peur au ventre que l’on voit rôder ces miliciens aux abords de la ferme, attendant le moment propice pour surgir, molester ou tuer les Campbell. Ceux-ci sont les derniers fermiers blancs à défendre fièrement leur terrain, sur lequel ils emploient des centaines de travailleurs noirs. Ils prient Dieu et se verraient bien mourir en martyrs pour offrir au Zimbabwe un modèle de courage face à la tyrannie. Et c’est en ce point que le documentaire de Lucy Bailey et Andrew Thompson est délicat à commenter : à aucun moment le point de vue africain n’est évoqué, et les réalisateurs ne prennent pas la peine de brosser, même rapidement, un compte-rendu de la situation politique du Zimbabwe. L’essentiel du film retrace donc, à la manière d’un reportage de guerre, la violence psychologique subie par les Campbell, en comparant carrément leur sort à celui des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale... Leur seul espoir réside dans le tribunal de la SADC (Southern African Development Community), situé en Namibie, et auprès duquel la famille a porté plainte, accusant le dictateur de discrimination raciale et de violation des Droits de l’Homme. Mais Mugabe fera fi de la décision de justice et un carton final nous apprend qu’en dépit de leurs efforts titanesques les Campbell ont perdu leur ferme. Ils ont même été victimes d’un passage à tabac d’une violence inouïe. Mugabe et l’Africain blanc met donc en scène des individus dotés d’une force morale impressionnante. Ils deviennent ici les hérauts de l’opposition à la dictature raciste du Zimbabwe. L’aspect géopolitique est, certes, occulté et nul doute que d’un point de vue purement analytique le film est loin d’être satisfaisant ; mais d’un autre côté la vue des visages tuméfiés de ces personnages que l’on suit depuis des semaines suscite une émotion bien réelle. Et si l’on ne devait retenir qu’une seule chose du film, ce serait cette émotion dénuée de toute réflexion. Interdits de tournage, les deux réalisateurs ont tourné l’essentiel du film en caméra cachée. C’est d’ailleurs ce qui fait sa force (c’est un témoignage captivant sur la sordide réalité du pays) et ce qui constitue sa limite (la gênante absence d’une diversité de points de vue). Mugabe et l’Africain blanc est donc un document puissant, touchant, mais souvent maladroit dans son discours.
© LES FICHES DU CINEMA 2010