Synopsis
À l’aube des années 1980, le studio d’animation fondé par Walt Disney n’est plus que l’ombre de lui-même. Le faste des années 1950 et 1960 a cédé la place à un lent déclin créatif au sein d’une compagnie en manque de leadership après les morts du fondateur Walt, en 1966, puis de son frère, Roy, en 1971. Durant les années 1970, les films Disney, qui se reposent essentiellement sur leur patrimoine, marquent ainsi un net recul. Depuis le départ de son directeur, Don Bluth, le secteur de l’animation est exsangue. C’est dans ce contexte orageux que démarre Waking Sleeping Beauty, produit et réalisé par un ancien cadre du studio : Don Hahn (le producteur de La Belle et la bête et du Roi lion). En 1980, les grands succès sont loin, et si le studio brille encore au box-office, c’est grâce à des films "live". Pourtant, une nouvelle génération d’artistes a intégré le département d’animation et aspire à apporter de nouveaux projets. Le déclic vient en 1984. Confrontés à des rumeurs d’OPA par Saul Steinberg, Roy E. Disney (le neveu de Walt) et Stanley Gold obtiennent du conseil d’administration de restructurer la compagnie. Miller est débarqué, Frank Wells (de Warner) et Michael Eisner (de Paramount) sont engagés, respectivement comme président et PDG du studio. Eisner ramène dans ses valises son bras droit, Jeffrey Katzenberg, auquel il "offre" la responsabilité du département d’animation. Fin commercial mais piètre meneur d’hommes, Katzenberg se heurte vite à ses créatifs, et engage Peter Schneider pour jouer les médiateurs. Sous son impulsion, plusieurs projets vont être lancés : Oliver & Cie, La Petite sirène et La Belle et la bête. Les succès publics grandissants se conjuguent à une reconnaissance critique inattendue. Pour raconter cette histoire, Hahn évite l’écueil des "interviews-canapé" en utilisant uniquement les voix de ses intervenants sur de nombreuses images d’archives. Certes, il cède, de temps à autre, à un sentimentalisme lourdaud et évite toute polémique, mais l’intérêt du film est ailleurs. En effet, l’auteur exploite des images rarissimes, qui éclairent sur les relations d’amour / haine qui dominaient la direction du studio de l’époque. C’est là que Waking Sleeping Beauty se révèle passionnant : en montrant comment le choc des egos et les luttes intestines entre les dirigeants ont pu engendrer de vraies réussites sur le plan artistique. Le triomphe du Roi lion marqua la fin de ce cycle : la disparition (quelques mois plus tôt) de Wells, véritable médiateur entre Eisner et Katzenberg, poussa ce dernier à voler de ses propres ailes (il est le fondateur de DreamWorks avec S. Spielberg et D. Geffen). Dès lors, on ne peut que regretter que le documentaire se termine en 1994 et ne se soit pas penché sur la décennie suivante, qui marqua l’avènement de Pixar et l’explosion de la concurrence dans l’animation, avant de se terminer par l’éjection brutale d’Eisner en 2004, organisée par celui-là même qui l’avait fait engager : Roy, l’éternel garant d’une certaine tradition...
© LES FICHES DU CINEMA 2010