He Fengming (2006) Bing Wang

Fengming, chronique d'une femme chinoise

Pays de productionChine
Sortie en France07 mars 2012
Procédé image35 mm - Couleur
Durée186 mn
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Générique technique

RéalisateurBing Wang
ScénaristeYang Wang
Société de production Wil Productions (Hong-kong)
Coproduction Fantasy Pictures (Hong Kong)
Producteur K. Lihong
ProducteurLouise Prince
CoproducteurFan Lin
Producteur exécutifZhu Zhu
Producteur exécutifRikun Zhu
Distributeur d'origine Capricci
Directeur de la photographieBing Wang
Ingénieur du sonJinguang Shen
MonteurAdam Kerby

générique artistique

Fengming He

Bibliographie

Synopsis

C’est en 2004 que Wang Bing, le réalisateur de ce témoignage magistral, qui plonge au coeur de la résistance humaine et aux fondements d’une personnalité d’exception, décide d’adapter à l’écran un recueil de nouvelles chinoises, Adieu, Jiabianjou de Yang Xianhui. Il y est question des destins sacrifiés d’hommes, envoyés par milliers dans les camps de rééducation qu’impose alors, dans les années 1950 et 1960, l’orthodoxie maoïste. Wang Bing, soucieux de ne rien inventer, ni ajouter aux malheurs de ces purges pour ne pas en altérer la force et la violence, se lance dans la recherche éperdue des survivants, escomptant bien que leur récit devienne matière vive de son film (depuis terminé, et intitulé Le Fossé [v.p. 285]). Or, seuls quelques rescapés accepteront finalement de témoigner. Si He Fengming compte parmi ceux-là, elle est la seule à livrer un récit d’une intensité telle qu’il se suffit à lui-même et fait revivre, par la seule puissance du verbe, miraculeusement exempt de ressentiment, l’épopée de la Chine communiste. Ce concentré de mémoire brute, sobrement exposé, n’est pas sans rappeler le monumental Shoah de Claude Lanzmann. Car ce travail tire sa force des mêmes principes : donner à voir et à entendre, sans rien montrer, tous les récits possibles car mêlant la colère muette des morts et le chagrin immense des survivants qui ne veulent pas se taire. Pendant les 186 minutes que dure ce documentaire, et dont pas un instant on ne perçoit le poids, la caméra sera placée face à Fengming, alternant simplement trois échelles de plan (large, moyen et rapproché) et c’est à peu près tout. La force inouïe du film provient donc du seul récit, de cette narration précise, quoiqu’elliptique quand il le faut, d’un véritable cauchemar. Il nous mène de la Révolution communiste à l’engagement (1949-1957), de l’incarcération pour "droitisation" (alors qu’ils sont parents de deux très jeunes enfants) de Fengming et de son époux, qui laissera sa vie dans un camp de travail (1958-1961), à la libération (1961), puis de la nouvelle incarcération (de 1966 à 1973) au coeur de la tourmente de la révolution culturelle, pour finir, selon la syntaxe en vigueur, par la "réhabilitation" (en 1978) de cette femme, engluée dans les rouages bureaucratiques insensés de la broyeuse totalitaire. La dernière partie de la chronique s’arrête sur la période menant aux années 1990 et marque le moment crucial où Fengming se décide à écrire ses mémoires qui, semble-t-il, font aujourd’hui autorité dans un pays qui a aussi sacrifié à l’étape - salutaire - de la démaoïsation et dont la figure du grand Timonier en héros révolutionnaire et humaniste visionnaire de la radieuse imagerie romantique est désormais chahutée par les siens mêmes. En toute fin de film, Fengming est curieusement filmée, sortant des toilettes, comme si elle consentait, maintenant que force est donnée au récit et que le témoin est passé, à ce que le grand tout-à-l’égout de l’Histoire, machine à digérer les plus improbables destins, emporte les scories de son existence et que ne reste, au final, que la force d’avoir vécu.
© LES FICHES DU CINEMA 2012
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