Synopsis
Elle s’appelle Sabine : toute la sincérité qui anime Sandrine Bonnaire tient là, dans la simplicité et la pudeur de ce titre. En passant à la réalisation, l’actrice ne se donne, en effet, pas d’autre but que de faire les présentations. Retenez ce prénom, semble-t-elle dire, retenez ce visage. Ce sont ceux de ma soeur. Elle a 38 ans. Elle est autiste. Elle s’appelle Sabine. Le film la montre dans le quotidien de son foyer d’accueil spécialisé. Visites, promenades, jeux, activités, mais aussi inquiétudes, coups d’éclat, saturations, crises... Avec discrétion, Sandrine Bonnaire filme la vie patiente de cette petite communauté d’autistes et d’aides-soignants. À ces images, font écho des vidéos personnelles de l’enfance des deux soeurs. Sans jamais le montrer, le film tourne autour d’un tragique séjour en hôpital psychiatrique où, faute de foyers d’accueil, Sabine a dû passer cinq longues années. Cinq années destructrices. La confrontation des images passées et actuelles fait froid dans le dos. La jeune fille des vidéos, vive, douée, légère, apparaît désormais apathique, bouffie, assommée par l’ingestion de médicaments, seule face à une maladie ignorée et négligée. Au cours d’une scène osée, Sandrine Bonnaire va jusqu’à montrer à Sabine ces souvenirs lointains. Des anniversaires, des chansons au piano, des séjours au bord de la mer et surtout un voyage à deux aux États-Unis, défilent sur le téléviseur du foyer. Sabine se regarde à l’écran. Elle se reconnaît et se juge, s’admire et se regrette. Elle mesure les effets du temps, les conséquences de sa maladie. La séquence est bouleversante, rassemblant en un point ardent des images que le montage s’efforçait jusque-là de maintenir parallèles. Elle s’appelle Sabine est tout entier guidé et soutenu par la colère sourde et impuissante qui apparaît au cours de cette scène et qui finit par devenir la nôtre : dénoncer la pénurie de centres d’accueil spécialisés et la révoltante incurie des services psychiatriques français. En faisant les présentations, Sandrine Bonnaire nous dévoile ainsi bien plus que le quotidien de sa sœur. En racontant Sabine, en racontant le drame de sa famille, elle témoigne pour des milliers d'autres. Avec tendresse et émotion, elle signe un plaidoyer percutant. Mais ce qu’il faut entendre derrière ce cri, c’est aussi une intense déclaration d'amour. À travers le portrait de sa soeur, la réalisatrice dessine celui de leur relation. Sandrine Bonnaire étant une actrice célèbre, un tel film aurait pu tourner au déballage racoleur. Il reste au contraire extrêmement digne et délicat, évitant toute forme de pathos ou d’égotisme. Il faut du courage et du talent pour réussir à divulguer de cette manière une part aussi intime de sa vie privée, en respectant autant ceux qui sont filmés que ceux qui regardent. On assiste alors, témoins devenus complices, aux séparations et aux retrouvailles des deux soeurs. Le genre de rencontre cinématographique qui vous marque à jamais !
© LES FICHES DU CINEMA 2008
Réalisateur