Synopsis
Si Trip to Asia nous donne à explorer des perspectives nouvelles, il ne s’agit pas uniquement, comme le titre pourrait le donner à penser, d’une découverte du continent asiatique. Car le voyage filmé par Thomas Grube a ceci de particulier qu’il est vécu par les musiciens de l’Orchestre philharmonique de Berlin. Une formation musicale mythique, composée de 126 musiciens dirigés par Sir Simon Rattle, que le réalisateur allemand et son équipe ont pu suivre tout au long de leur tournée en Asie, de Shanghaï à Tokyo. Se glissant auprès d’eux, dans les coulisses des concerts ou dans leur chambre d’hôtel pendant les moments de repos, Thomas Grube tente de comprendre le fonctionnement de l’orchestre, qu’il envisage avant tout comme structure sociale. Au gré des interviews qui ponctuent le film et s’intercalent parfois entre deux plans urbains plus contemplatifs, les musiciens confient ainsi leurs impressions et racontent leur quotidien : leur difficulté à exister individuellement au sein d’une formation collective, leurs loisirs, leur enfance, la place que tient la musique dans leur existence... Dans ce groupe mêlant différentes générations, chaque âge amène son lot de doutes, et chaque nouveau venu suscite un repositionnement de tous. Dans cette optique, la période choisie est révélatrice des singularités de cet orchestre-là : Thomas Grube suit, en effet, les musiciens au moment où les jeunes recrues, après avoir effectué leur année probatoire, attendent le verdict de leurs pairs. Car ici, à l’issue d’un temps où chacun est prié, non seulement de faire ses preuves musicalement, mais aussi de s’intégrer au groupe, le sort des novices est scellé par un vote collectif. Une procédure unique, qui permet d’entrevoir le fonctionnement singulier du Philharmonique de Berlin, autogéré depuis 1884. Cette approche permet de suivre tout au long du film certains personnages, dont on en vient à aimer les caractères et anticiper le sort (ainsi de Virgine Reibel, que les musiciens choisiront finalement de ne pas reconduire). Toutefois, les témoignages, souvent brefs et regroupés par thèmes, font ressortir tel ou tel particularisme avec un didactisme parfois forcé et un peu superficiel. Surtout, il est trop rarement question de musique proprement dite dans Trip to Asia. Et lorsque celle-ci est filmée, elle se trouve le plus souvent maltraitée par la mise en scène : les concerts ne sont, en effet, montrés que par brefs fragments, parfois couverts par une voix off. Le film semble ainsi imposer son rythme à la musique de Strauss et de Beethoven avec un peu trop de brutalité. Dommage, car en nous faisant pénétrer dans les coulisses de l’un des plus grands orchestres du monde, le film de Thomas Grube constitue par ailleurs un document rare et instructif.
© LES FICHES DU CINEMA 2008
