Nos lieux interdits (2008) Leïla Kilani

Pays de productionFrance ; Maroc
Sortie en France30 septembre 2009
Procédé image35 mm - Couleur
Durée108 mn
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Générique technique

RéalisateurLeïla Kilani
ScénaristeLeïla Kilani
Société de production CDP - Catherine Dussart Productions
Société de production INA - Institut National de l'Audiovisuel
Société de production Socco-Chico Films (Tanger)
Distributeur d'origine Documentaire sur Grand Ecran (Paris)
Directeur de la photographieÉric Devin
Directeur de la photographieBenoît Chamaillard
MonteurLeïla Kilani
MonteurTina Baz

générique artistique

Bibliographie

Synopsis

Nos lieux interdits, premier long métrage de la documentariste Leïla Kilani, interroge les traces que peut laisser un système politique sur une famille. Entre 1960 et 1980, sous le régime d’Hassan II, des centaines d’opposants politiques sont morts et des milliers ont disparu. C’est ce qu’on a appelé les "années de plomb". En 2004, l’Instance "équité et réconciliation" est mise en place par Mohammed VI afin d’enquêter et d’indemniser les familles victimes de ces violences d’État. La réalisatrice a filmé le travail de cette commission et choisi d’évoquer quatre histoires. À chaque fois, l’un des hommes de la famille a été enlevé, séquestré dans une prison secrète et torturé, parfois jusqu’à la mort, administrée de façon sommaire, en cellule. Parmi les quatre déportés évoqués, deux survivants apparaissent dans le film. Eux seuls peuvent témoigner de façon certaine. Pour ceux qui ont à jamais disparu, malgré les preuves et les recoupements, la commission ne pourra faire toute la vérité. Au fil des quatre années de tournage, les questions des familles se font de plus en plus pressantes et le désarroi grandissant. À la fin, on assistera à leur déception, quand, une fois paru, le rapport n’évoquera que les "noms" (Ben Barka, entre autres). Pour les autres, bien souvent, le mystère demeure. C’est donc de ces anonymes que la réalisatrice se préoccupe dans ce film. Pas de héros parmi eux : des gens simples, de condition modeste. Kilani les filme dans leur salon, car c’est là que la rumeur s’était propagée autrefois, faisant naître la peur. C’est par peur que la parole s’était tue si longtemps. Pour le film, c’est le lieu du dialogue entre les générations. Les femmes, surtout, s’expriment. Veuve, fille ou mère d’un déporté, elles tentent de justifier leur silence. Ceux qui ont grandi dans l’absence du disparu sont en colère, ils demandent des comptes. Les vies brisées sont évoquées avec pudeur. Pourtant, l’émotion est bien là. Les lieux de détention et de torture, dont même les noms étaient tabous, apparaissent de loin en loin dans le film, accompagnés de la voix d’anciens détenus, qui tentent de mettre des mots sur l’horreur. Il s’agit de "recoudre" la mémoire, de reprendre le fil du récit avant qu’il ne soit trop tard. Car ces bagnes terrifiants ont été peu à peu détruits : il n’en reste que de vagues traces et les tombes de ceux qui y ont péri. Les bourreaux, eux, ne seront ni entendus, ni jugés. C’est l’État qui se verra mis en cause, non les individus. L’indemnisation apparaît alors comme une maigre mais essentielle compensation. En reconnaissant la famille comme victime de l’État, elle lui permet d’exister à nouveau dans la société en effaçant la notion de "traître" qui lui était accolée. La réalisatrice sait remarquablement faire résonner le destin individuel avec l’histoire collective. Dans chaque bureau de la commission, le portrait du père de la Nation, Mohamed VI, surplombe les récits des drames que son père a fait subir au peuple.
© LES FICHES DU CINEMA 2009
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