Synopsis
Pendant des années, après avoir quitté l’école à 16 ans, Jean-Michel Bertrand a roulé sa bosse à travers le monde, passant un an au côté des nomades de Mongolie ou tournant au fin fond de la Sibérie. Il a gagné sa vie ainsi, en ramenant des images de ses périples et en les montrant au cours de séances pédagogiques type "Connaissance du monde". Fruit de plusieurs années de tournage en haute montagne, Vertige d’une rencontre a reçu le Prix du Meilleur Film au Festival Nature de Namur 2009. C’est un documentaire tout à fait hors normes que Bertrand a réalisé avec ses propres moyens financiers, seul, par passion pour la montagne et les animaux qui y vivent. Il a ainsi englouti ses économies et celles de son frère pour s’acheter du matériel de haute qualité, et est parti filmer en solitaire, par périodes de cinq à six jours pendant cinq ans. Pour ce film, tourné en Super 16 et caméra DV, le cinéaste s’est installé "à la maison", sur la terre de ses origines : la vallée de Champsaur, dans les Hautes-Alpes. La Nature y est exceptionnellement préservée, grâce au parc national des Écrins, le plus grand de France. Le réalisateur nous emmène donc dans son univers. Nous partageons, au fil des saisons, ses prises de vue solitaires. Nous assistons, tantôt bercés par la voix de Charles Berling, tantôt saisis par le grandiose de la musique, à l’éveil des marmottes, à la danse jalouse des coqs, à la balade d’un écureuil... Ce film raconte donc la poursuite d’un fantasme, par un passionné de la nature, qui a été moniteur de ski et "planteur d’arbres". Ce fantasme, c’est celui de "se rendre invisible, ne pas exister...", se fondre dans le paysage et s’oublier dans la "magie" du monde qui nous entoure. Alors il arpente les sentiers pierreux de montagne, avec 50 kg de matériel, aidé par l’âne Bourriquet, puis par son petit cheval Mistral, se filme avec sa caméra DV ("pour montrer à ma femme et mon fils ce que je fabriquais là-haut"), planqué sous une tente de camouflage, bougeant le moins possible, seul, transi le plus souvent mais tout excité à la vue d’animaux en liberté, s’affairant à leur survie quotidienne. Car le réalisateur cherche à comprendre la place de chacun dans l’équilibre de la nature, auquel l’homme ne devrait participer qu’en s’effaçant. En adoptant cette modeste posture, Bertrand réussit à capter des images magnifiques. Grâce à ses deux techniques de prise de vues (l’une au service de son journal intime, l’autre à celui du documentaire animalier, plus classique), il met en valeur la beauté suspendue de la nature. Partageant le plaisir d’en observer les trésors, nous regretterons cependant que la fibre écologique de ce cinéaste nomade soit quelque peu discréditée par un anti-humanisme qui oppose systématiquement les gentils animaux aux méchants hommes.
© LES FICHES DU CINEMA 2010