Synopsis
En 2009, une opération militaire américaine d’envergure est lancée en Afghanistan. Le réalisateur Danfung Dennis ne possède qu’une caméra et suit dans leur avancée les troupes d’assaut. Il progresse avec l’infanterie, de villages en villages, et doit faire face au mutisme ou à la colère des habitants. Ceux-ci ont peur pour leurs enfants, leurs récoltes, et sont réticents à collaborer avec les Américains. Des soldats meurent sous les yeux de Dennis. Parallèlement à ces images du front, on suit la convalescence du jeune sergent Harris, en Caroline du Nord. Peu avant la fin de son service, il a été touché à la hanche par une balle et doit suivre une longue rééducation. Chaque mouvement de la vie quotidienne est un défi auquel Harris fait face avec l’aide de sa femme. L’épreuve est difficile pour leur couple. On passe de ces moments du quotidien aux champs de bataille en Afghanistan. On revoit Harris en meneur d’hommes, avant sa blessure, puis, chez lui, ayant besoin de sa femme pour mettre son pantalon. Harris raconte qu’il est devenu marine pour tuer. Tout ce qu’il désirait quand il était jeune était tuer. Aujourd’hui, il sait qu’il claudiquera toute sa vie, si seulement il arrive à passer toutes les étapes de la rééducation. Il veut néanmoins retourner au front, réintégrer l’armée d’une manière ou d’une autre. Il n’a connu que ça et ne sait faire que ça. Le documentaire du jeune réalisateur Danfung Dennis est une entreprise d’une audace inconsciente. Armé d’un Canon 5D, un appareil photo doté d’une fonction vidéo de bonne qualité, il a participé à une opération militaire américaine extrêmement dangereuse. Il en est revenu avec des images intenses, qui retranscrivent au plus près le quotidien de la guerre : les ordres fusent, les hommes tirent sur des cibles invisibles, personne ne sait ce qui se passe vraiment, mais tout le monde panique. On est en Afghanistan mais ce pourrait être n’importe quelle guerre. Et soudain, une déflagration fait trembler l’objectif : un mort, un homme déchiqueté, les pleurs de son ami. Le réalisateur est passé à quelques mètres de la mine artisanale en cherchant à recadrer son plan. Il y a une témérité dans ce documentaire qui rappelle celle de ces soldats engagés "pour tuer". Les campagnes de publicité pour le jeu vidéo de guerre Call Of Duty : Black Ops (sorti en 2010 avec le slogan "Il y a un soldat en chacun de nous") n’ont jamais semblé si proches de la réalité. Et le soldat Harris joue à ce jeu, dort avec son arme et ne rêve que de retourner au front et tuer. Le parallèle avec le dur retour à la réalité du soldat blessé n’a rien de bien original mais est traité, comme le reste, avec innocence et sincérité. Le film ne cherche pas la finesse, mais tend au contraire à choquer le spectateur. Dans la lignée de la télé-réalité, ce "cinéma réalité", témoignage d’une guerre aberrante, prend aux tripes et nous donne aussi à voir le portrait effrayant d’un homme formé pour tuer.
© LES FICHES DU CINEMA 2011
Réalisateur