Bovines ou la vraie vie des vaches (2011) Emmanuel Gras

Pays de productionFrance
Sortie en France22 février 2012
Procédé image35 mm - Couleur
Durée64 mn
DistributeurHappiness Distribution (source : ADRC)
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Générique technique

RéalisateurEmmanuel Gras
Société de production Bathysphère Productions (Paris)
ProducteurNicolas Anthomé
ProducteurJérémie Jorrand
Distributeur d'origine Happiness Distribution (Paris)
Directeur de la photographieEmmanuel Gras
Ingénieur du sonManuel Vidal
MixeurCyrille Carillon
MonteurKaren Benainous

générique artistique

Bibliographie

Synopsis

Emmanuel Gras, jeune et heureux réalisateur de cette sorte de conte philosophique bovin, filme avec une élégance, une intensité et une tendresse folles ces énormes ruminants aux yeux si doux, frangés de longs cils blancs, dont le regard, aussi las qu’introspectif, semble voir au-delà des apparences et des approximations humaines. Sélectionné à l’ACID (manifestation parallèle au festival de Cannes) en 2011, Bovines, documentaire quasi expérimental, résolument dénué de musique et de commentaire (autre que le bruit, obstiné et éloquent de la mastication des vaches), s’attache aux pas d’un troupeau, nourri en plein air. Le film fit ainsi le choix stratégique de se tenir loin de toute structure d’élevage industriel et ainsi, peut-être aussi, de rendre hommage à une agriculture raisonnée. Ce cheptel, solidaire, massif, majestueux, est suivi au plus près et parfois à hauteur de museau, dans le déroulé bucolique de son quotidien : brouter, ruminer, meugler, mettre bas, se réconforter, se réchauffer, faire bloc contre la pluie battante pour attendre, résigné, son arrêt. Dans la splendeur absolue de la nature verdoyante et généreuse, de la terre grasse, ici célébrée, du bocage normand, on les observe, fasciné. Silhouettes pourtant si familières de nos campagnes dont soudain on semble découvrir, par l’intérêt même qui leur est porté, la fascinante singularité, l’évidente sérénité mais aussi la réelle ingéniosité quand l’une d’elles s’évertue, armée de sa langue, à secouer une branche de pommier pour en faire tomber les fruits. Nous sommes projetés, à leur côté, dans une expérience sensorielle qui est celle du monde et dont on éprouve la stupéfiante beauté, rendue par des images d’une grande poésie : la rosée scintillante sur une toile d’araignée, le frémissement de l’herbe sous le vent, le grondement lointain de l’orage, le clapotis de la pluie qui martèle une flaque d’où émergent, globuleux, intrigués, les yeux narquois d’une jeune grenouille. Autant de plans pour lesquels le réalisateur joue sur l’échelle de valeurs et de tailles et dont l’élégance paraît renvoyer à des toiles de maîtres, entre Corot, pour le naturalisme délicat des paysages, et Brueghel pour la peinture si sensible de la réalité paysanne. Or, cette réalité paysanne est celle qui, au sein de cette paix, fait intervenir la mort. Car dans ce décor bucolique se joue une tragédie : les vaches ne disposent pas de leur destin et ne sont qu’un élément de la chaîne alimentaire humaine, comme le rappelle obstinément, tout au long de ce beau tête-à-tête, l’étiquette numérotée qui orne leurs oreilles. Lorsqu’un tracteur arrive à la fin pour hisser les veaux sur une remorque, les vaches, restées au pré et séparées de leurs petits, accompagnent d’un meuglement, sidérant, à la fois plaintif, consolateur et prémonitoire, cet arrachement définitif qui nous contraint, nous, humains, à nous pencher et à nous interroger sur notre propre rapport au monde et à la vie, dans sa bouleversante absurdité.
© LES FICHES DU CINEMA 2012
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