Synopsis
Pánico est un groupe de rock indépendant franco-chilien, créé au milieu des années 1990. Ses membres font partie de cette génération de Chiliens nés pendant la dictature et ayant affirmé, avec le retour du pays à la démocratie, une liberté d’expression nouvelle. Certains des musiciens du groupe (composé de quatre Chiliens et d’une Française) sont d’ailleurs des enfants d’exilés politiques installés en Europe, ce qui explique les influences de ce continent sur leur musique. Ce "rockumentaire" (il s’agit de mettre en valeur la création musicale, plutôt que de se livrer à une véritable "documentation" de la réalité) débute avec un concert à Santiago, la capitale du Chili, où le leader du groupe annonce à leur public leur projet de partir dans le désert enregistrer leur prochain album. En effet, à l’aide d’un matériel d’enregistrement perfectionné, ils commencent à saisir sur pistes sonores les différents bruits du désert d’Atacama. Les éléments minéraux délivrent un son singulier, qu’il s’agisse du mouvement du sable, du craquement du sel au sol, ou encore des échos de la roche. Pris isolément, ces sons s’invitent directement dans les compositions de Pánico, lorsqu’ils jouent parmi les étendues désertiques. Poursuivant leur tournée à la recherche de sons, les membres du groupe rencontrent d’anciens ouvriers, qui leur offrent la "musique" de leurs instruments de travail : en collant un micro à un burin, sur lequel cogne un mineur, l’enfonçant ainsi dans la roche, le son exprime l’identité spécifique du minéral. Ce qui fera dire à l’un des intervenants du film que le groupe est parti "à la recherche du son de l’or". Dans d’anciennes usines désaffectées, ils enregistrent les sons produits par la confrontation entre des instruments et des matériaux abandonnés, ou bien les éléments naturels : ainsi, cette guitare suspendue, et dont s’extraient quelques notes au gré des mouvements du vent. Si l’on peut ici penser à la démarche des musiciens de Sound of Noise (Ola Simonsson et Johannes Stjarne Nilsson), La Réverbération s’inscrit pleinement dans un contexte spécifiquement chilien. Ainsi, la démarche de ces jeunes musiciens partant à la découverte d’un pays qu’ils ne connaissent que très peu (en raison de leur exil en Europe), et souhaitant créer leur musique au contact de traditions oubliées, évoque-t-elle celle menée par Violeta Parra (Violeta d’Andrés Wood [v.p. 678]) plus d’un demi-siècle plus tôt. Ainsi, le film apparaît comme un récit initiatique, qui décrit une musique naissant d’un retour aux origines. Alors que Violeta Parra recueillait le folklore musical chilien, Pánico s’attache, avec délectation, à saisir les éléments naturels et anthropiques, comme autant de vestiges d’une histoire récente. Et l’on pense alors à ces femmes recherchant inlassablement les traces de leurs "disparus" dans le désert d’Atacama, dans Nostalgie de la lumière de Patricio Guzmán. Entièrement dédié à la musique en train de se créer (aucun entretien face caméra, peu de moments montrant le groupe en train de faire autre chose que de la musique), La Réverbération n’en fait pas moins surgir l’histoire récente du Chili à chaque instant.
© LES FICHES DU CINEMA 2012
Réalisateur