Synopsis
Tandis que la foule déambule paisiblement dans les rues du Londres d’aujourd’hui, Joe Schlesinger, journaliste à CBC Newsworld, exprime en voix off sa gratitude envers l’homme qui lui sauva la vie : Nicholas Winton qui, avant le début de la Seconde Guerre mondiale, entre mars et août 1939, parvint à sauver 669 enfants juifs, tchèques et slovaques, du génocide nazi. Ainsi commence ce documentaire de Matej Minác dont le premier long métrage, déjà consacré à Winton (Nicholas Winton, la force d’un juste, 2002) avait marqué l’opinion publique, en République Tchèque notamment. Pourquoi et comment ce jeune courtier insouciant de 29 ans, champion de voile et de ski, s’est-il impliqué dans la dangereuse organisation du transport, en huit convois, d’enfants juifs de Prague à Londres pour qu’ils soient adoptés par des familles anglaises ? C’est la question que posent Schlesinger (qui est donc le narrateur du film) et de nombreux autres rescapés, à Nicholas Winton lui-même (103 ans). «Si ce n’est pas manifestement impossible, c’est qu’on peut y arriver», répond-il modestement. Par son travail historique fouillé, La Famille de Nicky révèle au public le parcours héroïque de ce Juste, surnommé «le Schindler britannique». Classique, la réalisation de Minác parvient toutefois à éviter la déclinaison répétitive des témoignages face caméra, en faisant alterner des conférences filmées de rescapés s’adressant aux jeunes générations (souvenirs heureux de la tolérance multiculturelle des années 1930, balayée par l’antisémitisme nazi), avec des images et photos d’archives et des scènes de reconstitution. En fil rouge, la voix off de Schlesinger rend compte de la chronologie des faits et illustre la terreur qu’éprouvaient les enfants et leurs familles (l’occupation tchèque, Hitler passant l’armée d’occupation en revue, vomissant à la radio ses discours venimeux sur la haine raciale, adieux déchirants des familles au départ des trains). Tout commence en 1938 pour Winton, quand il interrompt ses vacances en Suisse pour rejoindre, à Prague, un ami affolé devant la fermeture des frontières, l’indigence des consulats et l’inertie américaine. Sir Nicholas Winton relate aux étudiants captivés sa découverte de réfugiés malades et transis dans des camps et sa première liste de vingt-cinq enfants juifs (confiés à la Croix Rouge suédoise), bientôt suivie par beaucoup d’autres. Ce n’est qu’en 1988 que sa femme, Greta, découvre par hasard l’album photo, tenu secret par son mari, des 669 enfants, la «famille de Nicky», aujourd’hui disséminée dans le monde. Minác filme enfin leurs retrouvailles en train à vapeur, de Prague à Londres. Les rescapés évoquent leur soulagement à l’arrivée en Hollande («Hitler, Goebbels, dans le cul !»), le bateau jusqu’à Liverpool, l’accueil des adoptants, l’infinie reconnaissance pour leur sauveur, auquel Elie Wiesel et le Dalaï Lama rendent hommage. Pour autant, le film de Minác, si documenté et émouvant soit-il, n’apporte guère de regard nouveau - c’est-à-dire un tant soit peu cinématographique - sur ce nécessaire devoir de mémoire. Par excès de pédagogie sans doute...
© LES FICHES DU CINEMA 2013
