Les Messagers (2014) Hélène Crouzillat, Laetitia Tura

Pays de productionFrance
Sortie en France08 avril 2015
Procédé image35 mm - Couleur
Durée70 mn
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Générique technique

RéalisateurHélène Crouzillat
RéalisateurLaetitia Tura
Société de production The Kingdom
Coproduction Territoires en marge (Paris)
Coproduction Cinaps TV
ProducteurMarie-Odile Gazin
Distributeur d'origine Prima Luce
Directeur de la photographieHélène Crouzillat
Directeur de la photographieLaetitia Tura
Ingénieur du sonHélène Crouzillat
Ingénieur du sonLaetitia Tura
MixeurDelphine Ameil
MonteurAgnès Mouchel
MonteurMarie Tavernier
Photographe de plateauLaetitia Tura

générique artistique

Bibliographie

Synopsis

Il y a des films qui nous restent, nous travaillent longtemps après la projection. Des films qui nous accompagnent, nous questionnent au quotidien, dont on a envie de parler à ses amis, à ses collègues, à tout le monde. Il ne suffit pas que le sujet soit important (ça se saurait) : il faut aussi que l’oeuvre trouve la forme qui convient, l’angle juste, la durée adéquate. Et quand il est question de choses particulièrement graves, que montrer ? Que laisser hors champ ? En s’attachant à la parole de personnes rescapées de l’enfer de la migration clandestine, Hélène Crouzillat et Laetitia Tura ont fait preuve d’une rigueur irréprochable. En s’interdisant le moindre effet de dramatisation ou de reconstitution, en ponctuant le film de photographies de lieux vides, plage ou barrière de barbelés, témoins eux-mêmes des terribles événements évoqués, les deux cinéastes ont su trouver le point de rencontre précis entre éthique et esthétique. Le film est beau, en ce qu’il recueille avec une infinie délicatesse les mots des parias de notre temps, en ce qu’il laisse le temps au spectateur de les entendre sans chercher à tout prix à l’émouvoir, et en ce qu’il ne commente pas ce qui n’a pas besoin de l’être. Parler de ce film en quelques lignes n’est pas facile. Les gouffres qu’il ouvre sont tels que tenter de transmettre l’expérience de sa vision paraît voué à l’échec. Soyons clairs : ce que ces gens ont vécu dépasse l’entendement. On n’est pas dans un reportage, on est chez Dante. La nudité de ces visages, de ces voix qui disent les mois de marche, les kilomètres de nage, les naufrages, la peur, les morts, est plus puissante que toutes les statistiques. Ce n’est pas de la pitié qu’on ressent, ni même de la tristesse : c’est de l’effroi, pur et simple. Car, au fil des récits de toutes ces disparitions, derrière tous ces compagnons d’infortunes, hommes, femmes et enfants morts noyés ou abattus et dont on ne sait ce que devinrent les corps, derrière tous ces cadavres sans sépulture, il y a un système. Un système dont tous les pays de l’Union européenne sont les complices, qui prétend empêcher la misère du monde de nous envahir, et qui est l’absurdité même. Un agent de la Guardia Civil (puisqu’il s’agit ici de la frontière de Melilla, entre le Maroc et l’Espagne) le confie anonymement : "Ce travail n’a aucun sens, beaucoup finissent en psychiatrie". Un responsable le dit face caméra : "On n’arrête pas un homme qui a fait 1 000 km à pied". Que fait-on alors ? Vous l’apprendrez en voyant ce documentaire, qui nous plonge dans cette banalité du mal que l’on a tendance à associer, en général, à la Seconde Guerre mondiale, mais qui se porte fort bien sur nos côtes européennes. Les consignes officielles sont pleines de bons sentiments. Mais, sur le terrain, on maltraite, on tue, on entasse les corps dans des fosses communes. La violence de cette mise à nu est proportionnelle au calme des images de ces lieux vides où les démocraties ont installé l’enfer sur Terre. En point d’orgue : cette photo montrant la barrière descendant le long des rochers et semblant s’enfoncer dans la mer, symbole grotesque d’un découpage de l’espace à l’origine des pires violences.
© LES FICHES DU CINEMA 2015
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