Manuel de libération (2015) Alexander Kouznetsov

Pays de productionFrance
Sortie en France19 octobre 2016
Procédé image35 mm - Couleur
Durée80 mn
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Générique technique

RéalisateurAlexander Kouznetsov
ScénaristeAlexander Kouznetsov
Société de production Petit à Petit Production (Paris)
ProducteurRebecca Houzel
Producteur exécutifAlexander Kalachnikov
Distributeur d'origine Nour Films (Paris)
Directeur de la photographieAlexander Kouznetsov
Ingénieur du sonAlexander Kalachnikov
MixeurNathalie Vidal
MonteurAlexander Abaturov

générique artistique

Bibliographie

Synopsis

"L’espoir meurt en dernier" dit Yulia. "Le mien est déjà mort", lui rétorque Katia. Terrible entame pour ce documentaire d’Alexander Kuznetsov (Territoire de la liberté, 2014), un soir d’hiver, lors d’une pause cigarette, après un court prologue durant lequel des malades ont exprimé quels étaient leurs rêves. Elles, elles s’appellent Katia (Kasimova) et Yulia (Daniluchkina). Privées de leurs droits civiques pour "incapacité mentale" suivant l’article 29 du code civil de la Fédération de Russie, internées à Tinskoï, kilomètre 3699 de la Transibérienne, elles sont amies, ont 24 et 34 ans et ont été abandonnées par leurs mères - Katia à 4 ans et Yulia à la naissance. Passées d’orphelinats en internats, elles attendent de devenir libres en vertu d’une nouvelle loi parue en 2015. Si elles se ressemblent, chacune a le visage tourné dans une direction opposée : Katia, vers le passé, qui alimente sa colère, et Yulia vers l’avenir et l’espérance. Alerté par Sergueï Efremov - ancien directeur d’école aux commandes de l’internat depuis dix ans - d’une possible issue positive pour Yulia, le réalisateur reprend les deux "héroïnes" malgré elles de son premier documentaire Territoire de l’amour (2010, inédit en France), et nous invite à suivre, quatre ans plus tard, l’énième procédure de demande de libération. Avec intelligence, le réalisateur nous place en position de compassion, et non d’empathie, nous autorisant une mise à distance salutaire pour jauger, apprécier, penser, soutenir Katia et Yulia... sans tomber dans une forme d’émotion facile. Cette réussite est due à sa mise en scène, à la fois proche et discrète, comme à ses images de paysages, tantôt défilants, comme le temps et les saisons, tantôt fixes, et à sa façon de nous faire ressentir la froideur des salles institutionnelles (tribunal, hôpital), qu’elle met en parallèle avec la chaleur humaine des internés. À sa façon, enfin, d’alterner l’obscurité et la lumière, lesquelles se font métaphores des émotions, espoirs et enfermements ressentis par les "malades" de ce lieu où ceux qui sont atteints de pathologie lourde côtoient ceux qui sont victimes de ne pas avoir été désirés (et vivraient, donc, en toute liberté de ce côté-ci de l’Europe). En effet, c’est de la misère psychologique, des parents et du pays, qu’il s’agit ici, face aux rêves persistants et à la solidarité, entre les internés et avec le personnel soignant. "Pourquoi est-ce si difficile ?", interroge Katia, assommée après que les experts et la juge n’ont pas tranché sur son cas. "Quand ils ne sont pas sûrs, ils préfèrent les expertises" lui répond son camarade. Plus que juges, Sergueï Efremov et le réalisateur sont les témoins de la lutte du pot de terre contre le pot de fer. Finalement, Yulia finit par voler vers la liberté. Katia, elle, retourne jouer la Lettre à Elise de Beethoven, mélodie pour piano mélancolique et obsédante. Mais le rideau qui tombe sur son visage en larmes laisse percer des ajours permettant d’espérer qu’elle aura aussi sa part de lumière. On en ressort moins retourné que remué, notamment par la supplique adressée à Yulia par un interné: "Tu peux oublier cette maison de fous mais pas nous".
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