Synopsis
Vraie balade au pays de l’amitié sur fond du droit à la sexualité des handicapés, ce film « imparfait », selon le réalisateur lui-même, illumine de bout en bout par la générosité, la bienveillance, la poésie et l’amour qui l’accompagnent. Autiste et déficient mental mais sociable et aimé de tous ceux qui le connaissent, Enea, 29 ans, vit à Udine entre sa mère Bruna, ses amis Alex et Carlo, l’usine textile où il travaille et le centre pour handicapés où, en plus de les assister, Francesca et Fatinga organisent des spectacles de théâtre dans lesquels il joue. En 2012, alors qu’il patiente et discute avec lui à l’arrêt du bus 11, Carlo Zoratti éprouve un sentiment d’injustice en constatant qu’il a plein de copines alors qu’Enea, avec qui il est ami depuis l’âge de 15 ans, n’en a aucune. Il décide donc de lui en trouver une avec la complicité d’Alex Nazzi, le troisième de la bande, et de filmer leur tentative. Pourvu qu’on m’aime est né, alternant, entre documentaire et fiction, séquences de vie quotidienne et celles où Elia, la grand-mère, tente de faire parler Enea de ses fantasmes devant des photos de magazines tandis qu’Alex et Carlo, eux, l’aident à assouvir concrètement ses pulsions. Première tentative : nous les suivons à la piscine. Hélas, Enea effraye toutes les femmes à force d’approches insistantes et maladroites. Carlo et Alex optent donc pour une prostituée. Nouvel échec. Ils l’emmènent dans un club de Graz, en Autriche. Idem. En réalité, la raison en est simple : malgré sa sexualité qui le travaille, Enea veut « une copine pour la vie », et non une compagne occasionnelle. S’adaptant à son exigence, ses deux amis l’emmènent à Betel, en Allemagne, dans un centre d’aide sexuelle aux handicapés. Tout se passe à merveille : Enea apprend à toucher une femme et à l’être par elle. Mais là encore, son obsession amoureuse l’empêche de « mettre l’oiseau dans le minou ». Ainsi, au fil des couleurs primaires soustractives (rouge, bleu, vert) et des touches de jaune... des musiques donnant un ton country... de sa pudeur - comme celle qui nous permettra de nous « échapper » par la fenêtre lors d’un moment intime entre Enea et Ute... de son énergie teintée de tendresse et d’humour... ou encore de ses brusques changements de cap... nous nous défaisons, avec une certaine euphorie, de nos a priori sur l’autisme. Et nous nous demandons ce que nous trouvons de plus admirable, entre l’attention d’Alex et Carlo envers Enea, les remarques parfois confondantes de justesse, voire de sagesse, de celui-ci pour évoquer son désir, ou encore l’abnégation, au centre d’assistance de Trebel, d’Ute et de ses assistantes « prostilogues », ainsi que les baptise Enea... Sans doute tout cela nous émeut-il à la fois. C’est pourquoi, quand, revenus à Udine, Enea et ses amis se confient avoir mutuellement beaucoup appris de leur odyssée, nous devons convenir en avoir appris tout autant qu’eux, au point de bénir ces imperfections scénaristiques qui révèlent si parfaitement l’humanité du film, au point d’en faire un quasi « feel good movie ».
© LES FICHES DU CINEMA 2017