Synopsis
À l’occasion des trente ans du groupe marseillais, ce documentaire suit la bande haute en couleur dans sa nouvelle tournée, revenant à cette occasion sur sa création et son évolution. Il n’est pas besoin de connaître Massilia Sound System pour apprécier ce film. De facture classique, alternant moments de la tournée, entretiens face caméra avec les membres du groupe et images d’archives, il retrace le parcours tout à fait singulier d’un collectif animé tant par l’amour de la musique et de la fête que par une certaine conception de la culture populaire. Pour Moussu T, Gari, Papet-J et les autres, il s’agit de résister à la standardisation centraliste, c’est-à-dire parisienne, du langage, des façons de vivre, d’être ensemble, de s’exprimer. Créé en 1984, le groupe détonne dès ses débuts en s’inscrivant dans un courant musical jamaïcain, celui du reggae, du ragga, du dub et autres variantes. C’est assez proche du rap, les paroles sont percutantes, en français et en occitan, et délivrées par les différents « MC » dans un « flow » rapide, ondulant et goguenard. Un bref moment excepté, Massilia Sound System n’intéressa jamais l’industrie du disque. Résolument indépendant, le groupe se débrouille à sa façon, hors des sentiers battus, et rencontre malgré tout un succès non négligeable. En témoigne ce concert géant donné à Marseille au début de cette nouvelle tournée. Les membres s’expriment tour à tour face à la caméra, se souvenant de la folie des premières années, quand tout - la musique, la vie, les tournées - se mélangeait, quand faire partie du groupe revenait à adhérer à un mode de vie. Aujourd’hui plus vieux mais toujours bien allumés, les acolytes ambitionnent rien moins que devenir un groupe folklorique, servir une tradition qu’ils conçoivent comme en perpétuel changement et non comme un héritage à conserver tel quel. On aurait aimé en savoir plus sur leur approche politique « décentralisatrice », inspirée notamment par Félix Castan. On aurait aussi voulu plus d’explications sur ce fameux « sound system » hérité des Jamaïcains. Il s’agit d’une installation permettant de diffuser sa musique n’importe où, de mixer, de chanter là où on veut. Répondant, à l’époque, à l’absence de la musique populaire jamaïcaine dans les radios, ce dispositif est une sorte de média portatif apportant dans la rue une musique boudée par l’industrie. Le film le montre bien : plus qu’un agencement technique, le sound system est une façon d’établir un rapport horizontal au public, de communier dans un esprit convivial. Ainsi est née cette tradition du groupe d’offrir le pastis à ses spectateurs. Massilia Sound System défend avant tout un art de vivre qui, de fait, a pratiquement disparu des villes. Le bagout et le charme de ces musiciens, joyeux autant que râleurs, séduit irrésistiblement, que l’on soit ou non amateur de reggae. Manquent sans doute au film un retour sur l’évolution de Marseille ces trente dernières années, et des éclaircissements sur les influences du groupe, en particulier celle des Fabulous Trobadors de Toulouse.
© LES FICHES DU CINEMA 2017
