Synopsis
Un jeune patriote, documentaire sorti en 2017, Prix du Jury du 39e festival international du film de Hong Kong, étudie la pratique du communisme et brosse un portrait de la jeunesse née après la chute du bloc communiste et les manifestations de la place Tien An Men. Le parti pris de Du Hai-bin, dont Un jeune patriote est le quatrième documentaire, est singulier : plutôt que de s’intéresser à la rébellion, il se concentre, comme son titre l’indique, sur un jeune patriote appelé Zhao Changtong, originaire de la province du Shanxi. Le film se focalise sur quatre années de sa vie, entre 2010 et 2014. L’originalité de l’exercice réside dans le fait qu’il filme, non pas les voix s’érigeant contre le parti communiste unique, comme le font actuellement bon nombre de cinéastes chinois (à commencer par Wang Bing et Jia Zhangke), mais le « fruit » du parti, ce que la république populaire a créé, de façon à mettre en lumière l’endoctrinement perpétuel d’une jeunesse qui vénère Mao Zedong : celle qui rêve au bon fonctionnement de la nation, et dont le seul souhait est d’entrer dans l’armée pour mener à bien son devoir de « citoyen ». Certaines séquences, frontales et éminemment parlantes, glacent le sang, tant le jeune homme semble instrumentalisé. Mais ses désirs d’ambition au sein de la hiérarchie communiste sont irrémédiablement suivis d’une déception : ses voeux ne sont pas exaucés, ses idéaux sont balayés par l’apparition d’un nouveau mode de pensée, celui de la jeune génération qui rejette les vieilles doctrines du parti. Au fanatisme succède la mise en doute de la légitimité du système : et s’il faisait fausse route ? L’idée l’effleure pour la première fois lorsque, sa maison natale menaçant d’être détruite par des promoteurs immobiliers, la justice ne fait rien pour l’aider. Le scandale de Bo Xilai, puis la situation du maire de Chongqing, accusé de détournement d’argent public et de meurtre, n’aident en rien Zhao. Sa foi est définitivement ébranlée lorsqu’il tombe amoureux : il abandonne alors son fanatisme militaire pour mener une vie normale. Le film, maladroit, s’inscrit dans la lignée des précédents documentaires du cinéaste, à commencer par San, sorti dix ans plus tôt, qui analysait les conditions de vie des travailleurs chinois au sein du parti. Le montage et l’enchaînement des situations ne semblent pas toujours justes, et le choix des archives peut sembler déconcertant. Mais l’ancrage profond du communisme dans la société est souligné à de nombreuses reprises et à grand renfort de détails : le film fourmille d’inserts et de zooms sur le visage de Mao, dans les rues, les restaurants, sur les affiches..., mais aussi de chants patriotiques déclamés par les partisans. Malgré le puissant discours politique, il est difficile d’avoir de l’empathie pour Zhao, dont, le plus souvent, les réflexions irritent. La structure filmique, laissant la part belle aux images, n’efface pas les nombreux temps morts du pamphlet, et les cadrages maladroits font du film une oeuvre intéressante à titre informatif, mais dispensable d’un point de vue cinématographique.
© LES FICHES DU CINEMA 2017
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