Synopsis
Au départ de ce projet, il y a les questionnements du réalisateur Alexandre Mourot, alors jeune père, face à sa petite fille. En filmant celle-ci à mesure qu’elle grandit, il s’aperçoit que laisser sa fille agir seule semble être le meilleur moyen pour elle d’apprendre vite et en toute liberté. Bientôt, ces réflexions le conduisent à s’intéresser au travail de Maria Montessori, qui est connue pour avoir expérimenté, au début du XXe siècle, une nouvelle méthode éducative qui porte désormais son nom et est appliquée dans des écoles qui lui sont spécialement dédiées. Fort des pistes lancées par la pédagogue italienne, Mourot trouve confirmation qu’il est important de laisser à l’enfant un espace sans intervention de l’adulte. Après cette approche théorique, il décide alors d’observer la pratique, en allant filmer à Roubaix, dans la plus ancienne école Montessori de France, la classe de Christian Maréchal, qui accueille des enfants de 3 à 6 ans, parmi lesquels la fille du réalisateur. Il est clair que le film observe avec une bienveillance évidente la méthode Montessori. On peut donc être gêné par la dimension un peu publicitaire que cela induit. On peut aussi regretter que Le Maître est l’enfant ne soit pas une enquête dont le titre aurait pu être « pour ou contre Montessori ? » et qui aurait alors impliqué de parler du coût de ces écoles (et de l’élitisme qui en découle) ou de s’interroger sur le devenir des enfants éduqués de cette manière (est-il si différent de celui des enfants de l’école publique ?). Mais c’eut été un autre film. Celui-là a un projet différent, et ne s’en cache pas. Ici, il s’agit uniquement d’observer en détail ce qu’est la méthode, d’être attentif à ce qu’elle nous apprend, de façon générale, sur le fonctionnement des enfants face à l’apprentissage. Et donc, au-delà du pur prosélytisme pour les écoles Montessori, c’est une façon d’aider les parents à s’interroger aussi sur leur propre pratique, la question de la marge d’autonomie laissée aux enfants étant une question qui ne se pose évidemment pas qu’à l’école. La caméra, attentive et discrète, capte quelques moments de grâce : des petits découvrant le charme discret des fermetures Éclair, le visage concentré à l’extrême d’un porteur de pichet d’eau ou d’un éplucheur de pomme, des séquences de « tutorat » où un plus grand apprend à un plus petit des notions de géographie... Si ce film est militant, c’est par sa façon de montrer que, à l’encontre d’une idée reçue, les enfants ne sont pas naturellement paresseux, qu’ils ne cherchent pas forcément la facilité, mais qu’au contraire ils sont têtus et obstinés dans leur désir d’apprendre. Le Maître est l’enfant a, par ailleurs, le grand mérite d’être un documentaire dont la forme s’accorde avec le sujet. La base de la méthode Montessori étant de ne rien imposer, le film fait de même. La caméra saisit simplement la vie qui s’écoule devant elle. Le réalisateur fait confiance à ses « acteurs ». Il sait que ce sont eux qui sont justes, donc il s’efface.
© LES FICHES DU CINEMA 2017