Demons in Paradise (2017) Jude Ratnam

Pays de productionFrance ; Sri Lanka
Sortie en France21 mars 2018
Procédé image35 mm - Couleur
Durée94 mn
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Générique technique

RéalisateurJude Ratnam
ScénaristeJude Ratnam
ScénaristeIsabelle Marina
Société de production Sister Productions (Paris)
Société de production Kriti a Work of Art
ProducteurJulie Paratian
Distributeur d'origine Survivance (Meudon)
Directeur de la photographieChinthaka Somakeerthi
Directeur de la photographieMahinda Abeysinghe
MixeurJean-Guy Véran
Compositeur de la musique originaleRajkumar Dharshan
MonteurJeanne Oberson

générique artistique

Bibliographie

Synopsis

"On avait tellement peur en laissant tout derrière nous" se souvient un couple de Tamouls qui arpentait peu avant les rues de Colombo "déguisé" en Cinghalais. La peur, l’absurde et le train, symbole d’évasion comme de déportation, sont au coeur de ce documentaire édifiant, qui ausculte les tensions qui opposèrent Cinghalais et Tamouls de 1977 à l’épouvantable guerre civile de 1983-2009. Sur un tel sujet, et pour sa première réalisation, qui lui aura demandé dix ans, Jude Ratnam aurait pu opter pour une approche didactique et pédagogique. Au lieu de quoi, il suit les traces de Rithy Panh (S21, L’Image manquante), Oppenheimer (The Look of Silence, The Act of Killing) et Barbet Schroeder (Le Vénérable W.) en privilégiant, caméra à l’épaule, les témoignages, les récits et les rencontres où s’entremêlent histoires personnelle et nationale. Émerge alors, sur de belles images proposant une visite faussement touristique du pays, un passionnant double jeu de mémoire : d’un côté, celle des victimes et des auteurs des atrocités ; de l’autre, la nôtre, embrumée par le vague souvenir d’un conflit entre armée sri-lankaise et indépendantistes tamouls autoproclamés Tigres. Un choix très pertinent : ce qu’on perd en précision, on le gagne en sentiments. Et si certains regretteront une forme de longueur, les autres laisseront le rythme les convaincre, au regard de l’actualité, qu’en ce domaine l’Histoire est un pitoyable et sempiternel recommencement. Rappel : en 1948, Ceylan, colonie britannique, obtient son indépendance et devient le Sri Lanka. Les Tamouls occupent un petit tiers nord, les Cinghalais les deux gros tiers sud (d’autres minorités se mêlent à l’ensemble). En 1975, humiliés par les Cinghalais au pouvoir, les Tamouls se radicalisent. En 1977 ont lieu les premiers massacres anti-tamouls (la mère de l’oncle du réalisateur en ressort folle). Le 23 juillet 1983 (dit "Juillet noir"), la guerre civile éclate. Barbare. Tout en affrontant les forces sri lankaises pour établir chez eux un pays "pur" ("Tamil eelam"), les Tigres tamouls éliminent sauvagement les factions rivales : ENDLF, ENLF, EPRLF, EROS, PLOTE et TELO. Commencé sur un air de partition de l’Inde, ce conflit s’achèvera ainsi sur un ton de guerre d’Espagne après avoir provoqué plus de 72 000 morts et 140 000 disparus, et épousé les mêmes horreurs qu’entre Hutus et Tutsis au Rwanda, Rohingyas et bouddhistes en Birmanie, chiites et sunnites en Irak. L’absurde en plus ! "Chez les Tigres, on ne nous donnait rien et les habitants de Jaffna dont on massacrait les représentants du Telo (900 morts) nous offraient du Coca-Cola", témoigne un ancien militant Tigre, avouant ne s’être interrogé sur cette "étrangeté" que bien plus tard et murmurant : "On a été si cruels". Tandis qu’autour d’un feu de camp, quelques adversaires tamouls d’hier ironisent : leur communauté a été "Indienne avec les Indiens, Cinghalaise avec les Cinghalais, Tigre avec les Tigres". Une mémoire enfouie mais non soignée pour une hypothétique réconciliation. "J’ai donné à mon fils un prénom tamoul. Nethran. C’est le nom du troisième oeil de Shiva. Le symbole de la culture tamoule. C’est une promesse : qu’il voie plus loin que ses peurs", conclut pour sa part Jude Ratnam.
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