Synopsis
Pour la sortie de "Une Affaire de femmes", Claude Chabrol avait rappelé un superbe passage des "Ecrits de combat" de Bernanos: "Français, votre prétendue Révolution Nationale, c'est la révolution des ratés... les ratés ne vous rateront pas. Il n'y a pas un de ces petits tartuffes qui ne se croient désignés par le Bon Dieu pour vous faire expier vos fautes et vous n'en avez commis qu'une seule... c'est de les avoir non pas dédaignés mais ignorés". A travers des actualités du 6 août 1940 au 3 août 1944, ainsi que quelques extraits de films ouvertement de propagande ("Le Péril Juif", "Forces Occultes" de P. Riché et "Nimbus libéré", dessin animé antisémite et anti-alliés de 1944), les fruits de la collaboration hitléro-vichyste que voyaient les Français au cinéma, la "farce sanglante" de Vichy se déroule sous nos yeux. Chabrol l'annonce clairement: "ce film ne montre pas la France telle qu'elle était, mais telle que Pétain voulait qu'on la voie". Le ridicule de ces "ratés" dont la haine, l'esprit de vengeance et la soif de pouvoir s'étale, ne fait pas rire. Les inserts de réclames - pile Wonder ou gaine Scandale - ajoutent au malaise. Le montage serré de ces actualités propagandistes, de la parade du grand punisseur Pétain, des sermons ou invectives des serviteurs du régime et/ou de l'occupant, permet de disséquer la France de Vichy dans toutes ses composantes. D'autant que le commentaire, oeuvre de deux des meilleurs spécialistes de la période, J.-P. Azéma et R. Paxton, précise, éveille. Les effets de la politique antisémite de Vichy, les rafles devançant les exigences allemandes, les camps français, le rôle du chef de la police Bousquet, le pillage de l'économie et le transfert de dizaines de milliers de travailleurs français en Allemagne, le soutien constant de Pétain à la LVF et aux crimes de la Milice.
Copyright, 1995 CMC/Les Fiches du Cinéma