Synopsis
2 janvier 1995 : les mineurs de Tower Colliery au Pays de Galles reprennent le chemin de la mine, mais cette mine est devenue la leur. En effet, en avril 1994, épuisés par la lutte contre le gouvernement Thatcher, ils avaient voté la fermeture ; mais leurs dirigeants syndicaux, refusant la défaite, les convainquaient de racheter la mine avec leurs indemnités de licenciement. J.M. Carré, auteur de documentaires souvent primés, et d'un remarquable long métrage de fiction (Visiblement, je vous aime, 1995) a voulu montrer la situation de cette entreprise peu commune quatre ans après qu'eut été exaucé en Angleterre le rêve formulé à la Libération en France : "la mine aux mineurs !". Il nous donne à en voir les espoirs et les difficultés. Si les acquis sont remarquables (meilleurs salaires, rendements accrus, sécurité plus grande), les difficultés ne manquent pas, ne serait-ce que pour convaincre les mineurs de ne pas prendre à volonté du charbon pour leur usage personnel au motif que c'est "leur" charbon. Mais la question majeure est peut-être celle de la fréquentation de plus en plus réduite aux Assemblées Générales. Le réalisateur montre bien une situation apparemment paradoxale : les cadres dirigeants ont une conscience politique plus "à gauche" et plus lucide que les mineurs ; ces derniers défendent principalement leur emploi alors que les cadres et les dirigeants syndicaux mènent aussi une réflexion politique sur l'avenir du socialisme. Ils savent qu'ils sont à contre-courant dans un monde "qui a basculé à droite" comme le dit Tyrone O'Sullivan, président de la mine, personnalité hors du commun et remarquable leader. Il voit plus loin, propose de diversifier les activités, par exemple en implantant un complexe touristique. Il est vivement combattu par les vieux mineurs et les retraités, mais finit par emporter l'adhésion de l'Assemblée Générale.Le film est composé de séquences tournées sur le vif, d'interviews des différents protagonistes et d'images prises dans la mine ou dans la vie quotidienne tout au long d'une année. Cette durée permet de voir évoluer les positions des participants, tel ce jeune ouvrier peu à peu amené à l'engagement. Ce souci humaniste nous vaut aussi des images émouvantes des défilés de mineurs, fanfares et bannières en tête lors de fêtes qui rappellent la longue tradition de lutte des mineurs gallois. Si les mineurs pensent qu'ils ont "piégé le système capitaliste", ils savent qu'on ne construit pas le socialisme dans une seule entreprise : comme le dit Tyrone O'Sullivan, "le monde étant dominé par le capitalisme, ce sera beaucoup de travail pour le changer... Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour créer à l'intérieur de notre monde une société plus socialiste." En donnant la parole à des gens qui mettent leur idéal en pratique, ce film sans bavardage se veut non de propagande mais d'espoir.
© LES FICHES DU CINEMA - 2000
