Synopsis
Dans les bois voisins de sa ferme qu'il sillonne quotidiennement, Bernardo se remémore ses promenades avec son petit-fils Jorge. Natividad, elle, nous parle de son mari, Fernando. De l'exceptionnelle foi en la politique et en son pays qui l'animait. Daniel est membre de la Police Autonome Basque. Il nous confie ses craintes quotidiennes, les menaces qui planent sur lui et l'incroyable insécurité qui entoure sa profession. Enfin, Ángel, lui aussi grand-père de Jorge, souffre de sa disparition, tout comme Begoña, sa mère. L'un et l'autre n'oublieront jamais chacune des dates importantes de l'enfance de Jorge, ni son sourire. Ses copains ne peuvent oublier son incroyable énergie communicative.Par-delà le drame personnel des deux familles meurtries par la perte d'un être cher, c'est la terrifiante situation de tout le peuple basque, prisonnier d'une idéologie, qu'E. Ortega Santillana tente de traduire. Car ces deux hommes (Fernando Buesa, porte-parole du PS au Parlement Basque, 53 ans et Jorge Díez Elorza, son garde du corps, carabinier, 23 ans) ont été sauvagement abattus le 22 février 2000 par un attentat de l'ETA. L'organisation séparatiste basque avait armé une fourgonnette chargée de plus de vingt kilos d'explosifs qui stationnait sur le campus universitaire de Vitoria, au milieu d'arbres centenaires. Le véhicule piégé explosa au passage des deux hommes, les tuant sur le coup. L'ETA éliminait ainsi un ancien membre du Gouvernement Basque qui avait osé se montrer critique vis-à-vis de l'organisation terroriste et de son entourage politique.Tout en respectant scrupuleusement les règles du documentaire, Ortega Santillana (qui en a déjà réalisé plus d'une trentaine pour la télévision) a véritablement souhaité signer un travail formel plus construit pour son premier long métrage. Il met en scène ses témoins, propose de longs plans de nature (signe de pureté et de vie), compose une atmosphère visuelle. Et ce qui pourrait être la force du film, en devient aussi parfois sa limite, voire sa faiblesse. Car, devant la détresse de ces trajectoires personnelles (celles détruites des victimes, comme celles brisées des survivants), ces mises en scène peuvent vite paraître inutiles voire démesurément envahissantes. Mais, le thème traité est, lui, bel et bien enthousiasmant. Car Santillana se propose de décortiquer de l'intérieur les coulisses d'un attentat presque anodin, quasi anonyme. Pas dans ses rouages factuels ou idéologiques, mais d'un point de vue purement humain. A quoi ont servi ces deux vies volées ? A qui ? Sans didactisme, il démontre la totale absurdité d'actes qui prennent en otage des vies humaines au nom d'une idéologie aveugle.
© LES FICHES DU CINEMA 2002
