Synopsis
En 1998, François Michelin signait un ouvrage,
Et pourquoi pas ?, mis en forme par deux journalistes dévoués (seul Yvan Levaï a accepté de paraître devant la caméra de J. Lemaire-Darnaud : mal lui en prit, son discours paraît faux, complaisant, ampoulé). Quelques mois après la parution, F. Michelin annonçait des milliers de licenciements... Fil conducteur de Paroles de Bibs : son livre, ses sentences qu'il dit humanistes, ses principes qu'il affirme chrétiens, confrontés au vécu d'ouvriers et employés de son empire de Clermont-Ferrand. Une vingtaine sont là. Pas forcément représentatifs : qui connaît Michelin sait quelle put être la crainte d'apparaître des plus vulnérables. Ceux qui osent étaient déjà repérés : des anciens, des syndicalistes de la CGT. La réalisatrice n'a pas tenté de donner la parole à François Michelin, estimant qu'il l'avait suffisamment eue d'ailleurs (ce qui n'est guère contestable !). Aussi, le propos peut-il paraître trop unilatéral.Filmés sans fioritures (pourquoi leurs noms n'apparaissent-ils pas lorsqu'ils interviennent ?), en noir et blanc - les séquences tournées en extérieur sont, elles, en couleurs - des Bibs (ainsi appelle-t-on au bord de la Tiretaine les salariés de "Bibendum" Michelin), commentent la prose du patron. Un livre écrit, comme le soulignait J.-M. Rouart dans
Le Figaro en décembre 2000, "par ce que le pouvoir est là" et que ces "grands patrons... veulent améliorer leur image, montrer qu'un coeur bat sous la cuirasse". "Aider l'homme à devenir ce qu'il est" y proclame F. Michelin. R. Sautarelle, ouvrière, expose comment elle fut licenciée après trente-cinq ans d'usine ; C. Degaraby, ancien prêtre-ouvrier, décrit le fossé entre le discours chrétien de F. Michelin et les réalités ouvrières, etc.Vite, trop vite, sont évoqués le passé trouble de la famille au temps de Vichy, ses talents pour retarder au maximum l'application des réformes sociales, ses bonnes relations avec les "politiques" de tous bords ; comment, quand on était, naguère encore, chez Michelin, on devenait un "michelin"... Parfois, certains témoignages dérapent, certains propos s'égarent : pourquoi les avoir conservés ? Pourquoi aussi, outre la présence d'Y. Levaï, celles d'un romancier (F. Salvaing), d'un économiste ou de deux sociologues, superfétatoires ? Restent les mots de ceux qui se taisent si souvent. Beaucoup racontent, rigolards pour oublier l'humiliation, comment la direction traita le personnel lors des cent ans de l'entreprise : comme cadeau, un morceau d'un puzzle-Bibendum géant, une meringue, un verre d'orangeade, et un petit coupe-vent maison en cas de pluie ; aucune prime...
© LES FICHES DU CINEMA 2001
