Synopsis
Amateur d'un cinéma dit "d'expérimentation", P. Coulibeuf s'attaque aujourd'hui à l'univers chorégraphique du Belge Jan Fabre. Après un doctorat consacré à P. Klossowski, Coulibeuf avait réalisé trois courtes fictions sur l'écrivain entre 1987 et 1988. Et, malgré une dizaine de films, il ne s'est toujours pas écarté de ses obsessions ! S'étant également penché sur l'oeuvre de l'écrivain autrichien L. Sacher-Masoch (mort en 1895 et dont le nom est à l'origine du terme "masochisme"), il ne peut s'empêcher de tout rapporter à une certaine perversion sexuelle : ainsi, ce qui se présentait d'abord comme une fine réflexion sur le corps et les interdits ne devient finalement que violence et provocation. Certains le regretteront, d'autres, quant à eux, préféreront peut-être apprécier la vision apocalyptique que nous proposent les deux artistes. Car, dès le début, et même si l'humour est présent (à condition que des scarabées sortant de la bouche d'une danseuse vous fassent rire...), c'est effectivement un monde étrange, vide et morbide qui nous est présenté. Les plans fixes de Y. Cape sont beaux, instinctifs et sans fioritures, laissant toute la place aux corps nus, torturés par les spasmes de leurs transformations (un homme est changé en chien de garde). Les dialogues, eux, sont très intellectuels, trop sans doute pour qu'on puisse s'y accrocher, et la principale protagoniste (l'actrice belge E. Deceukelier), en robe de mariée, n'est pas vraiment attachante. L'actrice gesticule, crie et fuit de salle en salle, de plan en plan (la multiplicité des lieux est sans doute l'une des meilleures choses qu'apporte le cinéma à la danse), à la recherche d'un prince, pas spécialement charmant (le film s'ouvre sur ce chevalier qui se bat contre le poids de son épée). Une atmosphère s'installe, qui n'est tout de même pas aussi sérieuse que celle d'un "StraubetHuillet". Quoiqu'il soit difficile de blâmer une narration inhabituelle, on peut reprocher aux Guerriers de la beauté de proposer des jeux sexuels un peu vains, plutôt qu'une réflexion concrète sur le sujet. Le film commençait justement par un retour aux sources : la nudité des corps dont il ne faut pas avoir honte, une femme mâchant les aliments de son fiancé ; mais les allusions sexuelles étant de plus en plus marquées, on assiste déçu à une triste perversion... Pour ceux que cela intéresse, le film peut donc constituer une introduction à l'univers de Klossowski, fait de métamorphoses et d'érotisme. Mais les simples cinéphiles, eux, peuvent passer leur chemin sans trop de regrets.
© LES FICHES DU CINEMA 2003
