Synopsis
En 2000, Naomi Klein dénonçait la tyrannie des marques dans
No Logo, succès planétaire devenu très vite symbole du mouvement altermondialiste. Cette jeune journaliste canadienne avait établi un rapport fracassant sur l'intrusion de l'entreprise dans nos vies quotidiennes, en imposant ses produits uniformisés et inventant une consommation-style de vie. Disneyland devenait le paradis sur terre, et notre identité se révélait par les vêtements que l'on portait. Quatre ans plus tard, Jennifer Abbott et Mark Achbar, "coréalisateurs activistes", épaulés par Joel Bakan, scénariste et auteur du livre éponyme, s'intéressent au comportement de l'entreprise, définie juridiquement comme une personne morale. En tant que "personne", elle a donc des droits et des obligations, au même titre que l'homme, légalement appelé, lui, personne physique. Mais l'entreprise se comporte-t-elle civilement ? Abbott et Achbar démontrent plutôt qu'elle présente tous les symptômes du psychopathe ! Parmi eux : indifférence aux sentiments d'autrui, duplicité et mensonges pour générer du profit, non-respect des normes sociales établies par la loi... En clair : licenciements abusifs, dégradation de l'environnement, exploitation de la main d'oeuvre "bon marché", etc. Les psy-documentaristes étayent longuement leur diagnostic par différentes études de cas, aussi édifiantes qu'hallucinantes. Les données ne sont pourtant pas nouvelles, l'adjectif "citoyenne" que l'entreprise veut s'adjoindre depuis quelques années tentait déjà de pallier les reproches qui lui sont faits. L'originalité de The Corporation réside plutôt dans son approche politique : il oppose subtilement le désir individuel au choix collectif, et ce choix collectif au désir de l'entreprise. Tout porte à croire en effet que l'entreprise a été désertée par toute âme humaine, et navigue seule sur les flots internationaux. Ainsi, individuellement, personne ne veut priver des gens démunis de leur seule ressource vitale : l'eau. Et pourtant, collectivement, tous acceptent rendre cette eau payante. Le paradoxe est des plus cyniques ! L'entreprise serait bel et bien devenue une personne, capable de décider, d'imposer ses choix et d'oeuvrer pour elle-même (tout en faisant croire qu'aucune autre solution n'est possible) et jouissant de droits de plus en plus étendus. Mais, si l'entreprise ne se comporte pas civilement, on peut se demander si on (et qui ?) attend d'ailleurs qu'elle le fasse. A l'heure glorieuse des suites sur grand écran, on attend impatiemment
The Corporation 2, la revanchede
© LES FICHES DU CINEMA 2004