Synopsis
En 1969, Sean a 5 ans. Il vit avec ses parents hippies et la communauté de marginaux qu'ils accueillent dans leur appartement de Haight Ashbury, à San Francisco. Il a Ralph Arlyck pour voisin : un jeune étudiant en cinéma, qui le filme pour un court métrage de fin d'études. Ce court métrage fait le tour du monde, salué notamment par François Truffaut, qui vient justement de signer
L'Enfant sauvage. Mais, Sean devient pour les autorités américaines l'exemple à éviter. Alors, trente années plus tard : qu'est devenu Sean ? Ralph Arlyck s'interroge. Il reprend sa caméra, et retourne à San Francisco (qu'il a quitté peu après la réalisation du court métrage). Résumons-nous : au moment où Arlyck reprend la route de son passé, nous ne connaissons de lui et de Sean que les quelques minutes de son court métrage, introduits au début du présent documentaire. Le gamin nous frappe d'emblée par sa lucidité décalée d'enfant traité en adulte, sachant manier les outils ou rouler (et fumer !) les joints. Sur ces images, Arlyck ouvre sa mémoire comme s'il racontait à ses enfants son arrivée au coeur de la révolution culturelle américaine. Ce parallèle entre sa vie et celle de Sean, qu'il retrouve en Américain moyen, plombier de son état, et filme alors plusieurs années durant, sera la trame de ce documentaire, qu'Arlyck semble laisser défiler en roue libre. Ne pas savoir où va le réalisateur, ni quel est véritablement son propos, constitue alors le charme et la limite du film. Charme, car les questionnements personnels qu'il soulève se dévoilent timidement, et rejoignent finalement des interrogations collectives. Les quelques images du Sean de 5 ans sont en effet fascinantes, car elles décrivent admirablement une époque (ou au moins un mode de vie), pleinement libertaire, voire hallucinatoire. Le retrouver trente ans plus tard nous interroge donc forcément sur le monde actuel. Jadis, l'idéologie hippie pesait sur ses pieds nus et devait influencer le reste de sa vie. Aujourd'hui, est-il devenu délinquant, marginal ou fou ? Grâce aux portraits de toute la famille de Sean, du père toujours anti-matérialiste à la mère "gouroutisée" par son nouveau compagnon, en passant par les grands-parents communistes, nous approchons de nouveau une vérité : celle d'idéaux quasi disparus, d'une liberté revenue dans le rang, d'une destinée finalement conformiste. Cependant, le procédé du questionnement personnel - celui du réalisateur sur sa propre conformité - via le portrait d'un autre peut sembler ici un brin artificiel, et dès lors laisser dubitatif sur le véritable propos du film...
© LES FICHES DU CINEMA 2005
Réalisateur