Synopsis
Rappel des faits, tout d'abord, pour comprendre ce que la télé a pu faire pour s'attirer de telles foudres. En 1998, P. Carles, trublion médiatique professionnel du dézingage filmé, s'attaque à la censure inavouée des télévisions et à la connivence entre journalistes et politiques dans Pas vu, pas pris. Il récidive quatre ans plus tard, en vengeur masqué de Pierre Bourdieu, contre Daniel Schneidermann, pour dénoncer le mensonge d'une télé qui ne fait que simuler l'autocritique. Dès lors, germe l'idée d'offrir aux téléspectateurs de vrais programmes critiques sur la télévision. Et l'arrivée de la télé numérique, la TNT, devait en toute logique rendre le projet possible. Ainsi allait naître le projet d'une chaîne indépendante : Zaléa TV. Mais il faut croire que la TNT n'est pas plus ouverte que le câble, le satellite ou l'hertzien : le projet est refusé ! D'où l'arrivée au cinéma de ce rageur
Tir Nourri sur la Télé (soit, en abrégé, TNT !) : un programme comprenant les deux films de Pierre Carles et un inédit, Désentubages cathodiques. Celui-ci est en fait une compilation de documents, réflexions et actions, conçus pour les programmes de Zaléa TV, et visant tous à donner des clés pour "ne pas se faire entuber". Ces extraits d'émissions tentent en effet de nous démontrer comment les chaînes de télévision désinforment (
Prise d'otage sur / par TF1), s'emballent (
Signal d'alarme) ou imposent un parti pris (
Bas les masques au bal des Oui-Oui). Hélas, leurs analyses ne s'imposent pas toujours par une grande pertinence. Elles semblent même souvent un peu faciles, voire hâtives, et peinent à dépasser une idée générale et relativement admise (la dictature de l'audimat et les connexions entre journalistes et politiques nuisent à la fiabilité de l'info). Il est donc difficile de tirer des conclusions claires ou de distinguer de réelles contre-propositions dans ce film, qui se termine sur les actions de la "Coordination des Sans Cravates", suggérant sommairement d'éteindre toutes les télévisions grâce à un "télextincteur universel d'écrans"... En fait, il manque à Désentubages, l'essentiel de ce qui faisait la force des deux films de Pierre Carles qui l'escortent. Tout d'abord, le sens de la construction (ce qui peut s'expliquer par la destination originelle des séquences et l'urgence dans laquelle elles ont sans doute été assemblées). Mais aussi : un scoop (comme les images volées de Léotard et Mougeotte dans Pas vu, pas pris), et une réflexion de fond (comme celle qu'apporte l'intervention de Loïc Wacquant dans
Enfin pris ?). Toutefois, Désentubages cathodiques a le précieux mérite d'entretenir la flamme d'un cinéma de guérilla, qui s'impose dans les salles, accompagné de débats et des publications données aux spectateurs, pour tenter à toute force de faire bouger un peu les esprits.
© LES FICHES DU CINEMA 2005
