Synopsis
Aventurier, reporter, photographe, anthropologue... Pierre Verger a vécu mille vies, comme mille facettes d'une personnalité complexe, en perpétuelle recherche. Né à Paris en 1902, Verger est arrivé au Brésil en 1946 après avoir parcouru un bon bout de globe, arpentant inlassablement les cinq continents armé de son Rolleiflex. La photographie est alors pour lui autant une passion qu'un moyen de financer ses voyages. Le documentariste L. B. de Hollanda (neveu du compositeur Chico, petit-fils de l'historien Sergio) a choisi de se concentrer sur le Verger bahianais, celui qui photographia la communauté noire et qui s'initia aux cultes afro-brésiliens de Salvador de Bahia, sur lesquels il mènera des recherches approfondies. Sous l'égide de Théodore Monod, directeur de l'Institut français d'Afrique Noire, il publiera des ouvrages essentiels parmi lesquels
Fluxo e refluxo (1987). Devant la caméra, le chanteur, compositeur (et actuel ministre de la culture) Gilberto Gil joue les conteurs. Comme un enfant curieux, il part à la rencontre des nombreuses personnalités françaises et brésiliennes, amis et collègues, qui ont croisé la route du photographe. Il arpente les rues de Salvador, fait escale à Paris et, surtout, se rend au Bénin, où Verger a longtemps séjourné. Car, par ces nombreux allers-retours, P. Verger a fondamentalement participé à renouer les liens perdus entre les communautés yorubas des deux cotés de l'Atlantique. La majorité des esclaves envoyés à Salvador provenaient en effet du royaume de Keto. Là, G. Gil rencontre les pères et mères de saints (dignitaires religieux) qui initièrent et rebaptisèrent Verger, Fatumbi, son nom de candomblé, signifiant "celui qui est né deux fois grâce à la divinité Ifa". Les rencontres avec les amis bahianais de Verger sont les plus captivantes. A chacun, G. Gil pose la même question : "Finalement, Verger croyait-il à ces divinités ?". A chaque fois, la réponse diverge. Car, de l'écrivain Jorge Amado à la cuisinière du photographe, en passant par des amis anonymes et des dignitaires du candomblé, tous semblent avoir connu une personne différente. Un entretien très émouvant ponctue ces déambulations : c'est le dernier accordé par Verger, le 11 février 1996, la veille de sa mort. Précis, drôle et sage, il commente son travail avec humilité, depuis sa modeste maison de Salvador. Et répond enfin à la question de Gil... En mettant ses pas dans les pas de Verger, Gil lève peu à peu le voile sur les mystères du candomblé et sur ceux d'une personnalité. Comme Verger avant lui, on bascule alors dans une autre réalité, baignée par la magie des dieux africains, les orixas. Les prises de vues de Hollanda, chaloupées, pleines des couleurs africaines, sonnent alors comme l'écho contemporain des sobres photos noir et blanc de Pierre Verger.
© LES FICHES DU CINEMA 2005